mardi 26 mai 2015

Per qualche euro in più

Par Hong Kong Fou-Fou



Le retour de la rubrique qui vous aide à dilapider intelligemment votre argent de poche. Bouquins, disques, sorties, fringues, tout ce qu'il faut s'offrir pour être dans le rouge à la fin du mois. 

Le roman vrai d'un fasciste français par Christian Rol - Prix : 19,90 euros
J'ai un peu hésité avant de parler de ce livre, à cause de son titre. Ce serait fâcheux d'être fiché "facho" par des gens à l'étiquette facile. D'autant que le bouquin est écrit par un ancien du Gud, oh my God ! Eh bien tant pis, je prends le risque, je serais tenté d'écrire "Me ne frego", mais ça aggraverait mon cas. Je prends le risque parce que ce bouquin est passionnant, fort bien écrit et qu'il devrait intéresser tous ceux de nos lecteurs, de droite comme de gauche, qui aiment l'histoire contemporaine. Il nous plonge dans les années 60-70-80, à une époque où avoir des convictions politiques réclamait un peu plus de courage qu'aujourd'hui, où ça se limite souvent à pérorer sur Facebook. L'auteur nous fait suivre les tribulations d'un jeune Parisien, issu de l'aristocratie italienne, René Resciniti de Says, dit René l'Elégant, de sa naissance en 1951 à sa mort en 2012. Une succession de tranches de vie, à laquelle viendra mettre fin... une tranche de gigot. Il meurt en effet étouffé, victime d'une "mauvaise route". Des mauvaises routes, ou en tout cas des routes cabossées, le héros du bouquin en a suivies plusieurs : voyou en mocassins Weston, minet du Drugstore jouant de la barre à mine, membre fidèle de l'Action Française, playboy chaud lapin du Quartier latin, volontaire dans les milices chrétiennes au Liban, le bonhomme n'a pas eu une vie vraiment monotone. Spécialiste des "coups" : de gueule, de poing, d'éclat et même d'état, avec Bob Denard au Bénin en 1977. Il a aussi mis la main dans le SAC, en commettant deux assassinats vraisemblablement commandités par les barbouzes de la République. Nul doute que son dossier aux Renseignements Généraux devaient contenir plusieurs tomes. Outre ses dérives militaro-politiques, l'homme était également un esthète, un flambeur allergique au travail, ce qui ne devait pas l'aider à satisfaire son addiction pour les costumes sur mesures et les belles sapes.
Echantillon gratuit : "Si c'est ton choix, vas-y mon ami. Il n'y a rien de pire que l'ennui et les convenances bourgeoises. Mais alors donne-toi les moyens. Fais-le avec style et élégance. Une vie libre et aventureuse ne se conçoit qu'avec des souliers bien cirés. Mais un conseil : laisse tomber la politique."

Les aventures d'Hergé, par Boquet et Fromental et Stanislas - Prix : 17,95 euros
Restons dans les RG, pouf pouf pouf (je pouffe), avec cette nouvelle édition des aventures du créateur de Tintin. Vous avez déjà les première, seconde et troisième éditions ? Je m'en doute, nous sommes entre gens comme il faut. Mais l'éditeur est un malin : l'album contient 22 pages de bonus, avec plein de jolis dessins en N&B du talentueux Stanislas. Du coup, évidemment, vous allez acheter ce bel objet. Comme moi. Et pour ceux qui ne l'ont jamais lu, il constituera une bonne façon de découvrir la personnalité d'Hergé, nettement plus complexe que celle de ses créations sur papier. Toutes les périodes de sa vie sont évoquées, même celle pendant laquelle Milou aurait mieux fait de s'appeler Rex ; on y croise tous les dessinateurs qui ont fait la grandeur des studios Hergé ; on y parle de la tentative avortée du patron de se lancer dans la peinture, etc, etc, etc.
Echantillon gratuit : "Sacrés farceurs ! Trois jours haute mer pour dessiner petits tintins !"

Edimbourg, par Floc'h - Louis Vuitton Travel Books - Prix : 45 euros
Vous voulez acheter du Vuitton authentique, sans risquer de vous faire refourguer une contrefaçon ? Précipitez-vous sur ce livre. Le trait de Floc'h, à la précision micrométrique, est inimitable. Si vous êtes pêcheur à la ligne claire, il constituera une bonne prise. De toute façon, le vrai luxe ne doit pas être ostentatoire : bannissez de votre garde-robe les pièces siglées LV. Par contre, les amis à qui vous faites les honneurs de votre intérieur, en voyant ce bel ouvrage sur la table basse de votre salon (laquelle doit être plutôt encombrée, si vous avez suivi nos recommandations passées) pourront apprécier votre bon goût et louer votre discrétion. Nous retrouvons dans cet ouvrage les personnages de "Une vie exemplaire", "Où mène la vie ?" et "La belle vie", à savoir un père - avatar du dessinateur - et sa petite fille (il manque juste le lapin, qui leur en a peut-être posé un ?) Floc'h, le plus "vieille France" de nos dessinateurs, nous entraîne à leur suite à la découverte de la vénérable Ecosse, et plus particulièrement Edimbourg. Vous y apprendrez plein de choses passionnantes sur ces Scots pétris de traditions, comme la façon de mettre un kilt. Je viens de passer quinze minutes allongés par terre sur un rideau de douche, sans parvenir à le fixer convenablement. J'aurais peut-être dû choisir un rideau de douche écossaise...
Echantillon gratuit : "L'Old Course, c'est le pont d'Arcole, le Rubicon et l'Everest du golf. Je l'ai joué. Mal. Mais je l'ai joué !"



lundi 18 mai 2015

Les soldats de l’Asphalt

Par l'Homme Mystérieux 

Ces jours-ci un drôle de phénomène secoue le petit milieu rock de la ville rose, le nom d’un jeune groupe est sur toutes les lèvres … Asphalt.
Et vraisemblablement c’est parce qu'on y croit, qu'on y adhère et qu’on se retrouve dans ce quatuor post-punk qui rallie de plus en plus de "croyants" à chaque fois qu’il se produit en live.
Mais commençons par présenter les architectes de cet engouement inattendu : le groupe est formé de Roro à la guitare et au chant (qui est sans doute la plus enthousiasmante des guitaristes gauchères du moment !), de Tibo, guitare et chant, dont émane un charme ténébreux, Amaury à la basse toute en retenue (menaçante). Derrière cette ligne d’attaque la défense est assurée par Rémi Rami-Rez, jeune dandy toulousain connu dans les plus infâmes bouges de la rive gauche de la Garonne, succédant lui-même à Peter, mort au combat, qui avait en son temps pris la succession de Guillaume, premier batteur à officier dans le groupe voilà maintenant deux ans.

La maîtrise de leurs instruments acquise en militant dans diverses formations (power-pop, garage, punk) leur a permis de rapidement enregistrer un premier EP : "Abstinence, Chômage et Dépression", tout un programme politique et social pour les laissés-pour-compte de la génération Y. Cet EP sorti en 2013 donne le ton : punk rock lorgnant du côté de 77, des titres punchy et mélodieux comme "Parano song" ou "Enterre-toi vivant" qui trouveraient légitimement leur place sur une réédition des 30 plus Grands Succès du Punk (Skydog) améliorant par la même occasion un disque déjà parfait ! Mais attention il ne s'agit pas là d'un revivalisme stérile ou d'une de ces contrefaçons hélas si fréquentes de nos jours par lesquelles des groupes tentent de recréer un son, un look, une image, tentatives résultant trop souvent en un triste Xerox calqué sur des gloires passées. Non, ici c’est tout autre chose ; on peut aisément imaginer les membres d’Asphalt préparant leur coup autour d’une pile de disques sortis sur Chiswick, Melodíes Massacre, Small Wonder et j’en passe. Il est certain que les influences comptent pour eux ; à leur contact on constate une connaissance quasi-encyclopédique du punk et ses dérivés. Si les quadras que nous sommes ont grandi avec le trafic de K7 (le lycée aura au moins servi à ça), les "moins vieux" utilisent désormais tous les moyens à leur disposition pour développer leur culture. Pour une fois l'internet n'est pas que source d'idiotie et du dénominateur commun le plus basique. Mais ne nous méprenons pas, nous ne somme pas face à une bande d’antiquaires ou d'archéologues du punk rock, non, la trame de '79 convient parfaitement pour exprimer la réalité de ceux qui ont vingt ans en 2015, et il est certain qu’en pleine crise du capitalisme, en ces temps de recul de la liberté d’opinion, face à une société qui pousse une partie croissante de ses citoyens vers l'aliénation, ils ne manquent pas de matière première. Le terrain naturel pour un groupe nommé Asphalt est la rue et c'est bien là qu'on peut trouver la fière équipe quand ils ne sont pas sur la route, en répèt' ou sur scène car c'est un groupe qui vit ce qu'il décrit (et vice-versa). Leur devise est d'ailleurs "On zone. Point barre". A chacune de leurs prestations scéniques, un nombre croissant de convertis vient grossir les rangs de l'Asphalt Army : punks, skinheads intelligents et ouverts (non, ce n'est pas une blague !), garageux et kids fleurant le dernier bon coup, ils sont tous là. Ayant observé bon nombre de groupes à la manoeuvre, je peux affirmer que ce n'est pas à la portée des premiers venus que de parvenir à créer la communion parfaite avec le public. Asphalt est clairement de ceux qui y parviennent !
 
 
L'été 2013 ils ont enregistré deux titres au studio Swampland de Lo Spider, le Phil Spector toulousain. Sorties en septembre 2014 sur Juvenile Delinquent Records, éclectique label nantais réputé pour son bon goût, ces deux titres explorent là un son plus sombre et post-punk, la référence pointe plus du côté de la cuvée '79, réaffirmant ainsi leur talent et leur capacité à écrire et à composer d'authentiques tubes, dont le titre "Do you understand (me)?" destiné à devenir un classique du genre ; vous feriez d'ailleurs bien de vous procurer le 45t avant qu'il ne soit épuisé, car à moins d'être sot, fou ou actuellement en prison (voire les trois à la fois), rien ne justifierait d'ignorer un tel chef d'oeuvre.

L'année 2015 voit les Asphalt multiplier leur prestations scéniques : première partie de LSD à Toulouse, dates en Allemagne et en Espagne en discussion et projet d'enregistrement d'un premier album pour cet été ; c'est une étape cruciale pour le groupe afin de confirmer le succès des deux premiers singles et dissiper si besoin était un quelconque doute qui attribuerait leurs compositions solides et efficaces à un alignement favorable des astres ou à un pacte temporaire avec le Malin. Cet album en devenir viendra étoffer leur set list qui pour l'instant, seule critique que l'on puisse faire à leur égard, est un peu courte et nous laisse sur notre faim, n'en réclamant que plus !

La ville de Toulouse peut désormais dormir tranquille (après que les derniers ivrognes soient tombés tels le Général Custer) dans la douce satisfaction de savoir compter sur un groupe comme Asphalt. Mais ne tardez pas, Asphalt c'est à déguster sans modération, et leur moment c'est maintenant.
 
Retrouvez l'actualité d'Asphalt, les dates de concert et leurs 45t en écoute libre sur leur Bandcamp : http://asphalttoulouse.bandcamp.com/