jeudi 10 décembre 2015

Hé ben voilà

Par l'élève Moinet




Tout avait si bien commencé. C’est comme si c’était hier, en ce jour de grâce de l’an 2007 où mon futur patron me reçut dans son salon mordoré, lové dans son profond canapé pourpre, son peignoir de soie laissant apparaître une belle paire de jambes fuselées par de longues randonnées dominicales. Une dernière babouche, opiniâtre, tenait dans un équilibre précaire au bout de son pied. Jaloux.
- Entre Moinet, n’aie pas peur. Alors c’est donc toi ?
- Oui.
- Il paraît que tu es drôle.
- Euh…
- Es-tu drôle ?
- C’est-à-dire que…
- Je vois. Sais-tu ce qu’est le chat à neuf queues ?
- Oui.
- Ah quand même, il sait au moins quelque chose. Je propose de t’en faire tâter chaque fois  
que tu ne seras pas drôle.
- Non, non, pitié, pas le chat à neuf queues, non pas ça.
- Ah ah ah, il est déjà drôle ! Tu seras drôle désormais ?
- Oui, je serai drôle, oui, je serai drôle.
- Oh qu’il est drôle ah ah ah ah ah. A demain, élève Moinet ! Ahahahah.
Nous étions félins pour l’autre. Etreint par l’émotion, je me réfugiai dans ma  chambre de bonne mansardée. On me donnait ma chance. Enfin. Je devais la saisir. Je compulsai fébrilement ma collection de Pif Gadget et mes albums Panini cherchant désespérément l’inspiration. Au petit matin, la lumière m’apparut.  Guy Roux ! Voilà ! George Best ! Raymond Poulidor ? Oui, bien sûr ! Et puis Mark E. Smith, Maître Capello, L’homme du Picardie, Morrissey, Ian Curtis… Ian Curtis, Maître Poulidor, Mark E. Capello, L’homme du Morrissey… Décembre 2015 est arrivé. Sans crier gare. Pourtant j’entends passer le train-train quotidien.
A quoi bon me dis-je, sortir des articles, à défaut de mur Facebook, qui ne cocassent pas des briques. A quoi bon continuer à exhumer tant bien que mal les trésors enfouis de l’époque épique ?  Celle qui commença le premier jour de l’expo 58 à Bruxelles et se termina le dernier du Summer of love à San Francisco. Les 9 glorieuses : amour, gloire et beauté. Là et nulle part ailleurs. Tout était ambitieux, moderne et optimiste. Tout mon contraire.
J’ai épuisé mes sujets et mes sujets m’épuisent. Mes phrases courtes sont longues. Et dire qu’il me reste à décliner. Lentement, lentement, lentement. Et Perpignan - le genre d’endroit à l’envers que tout le monde connaît, mais où personne ne vient - qui n’est pas fait pour arranger le moral des troupes. Moins dure est la chute pour qui n’est pas monté très haut. Toujours ça de gagné.
Pourtant, il m’en reste un. D’article à solder. Comment s’appelle-t-il déjà ? “Hit the road Jack Lord Jim Clark Kent Hutchinson of a bitch”. Sept pour le prix d’un !  (Record à battre) A défaut de trois petits chats. Le genre de truc complexe qui me complexe et ne servirait qu’à asseoir ma réputation de plumitif aussi abscons qu’une notice de montage d’armoire à glace Ikea. A moins que je ne me rabatte sur un “I’m the man with the golden gun of Brixton”. Bref, n’importe quoi ! Chaque fois que je repense à ce que j’ai dû faire pour scribouiller ces pages… Je ne me le pardonnerai jamais. Et tout ça pour ? Pour ? Voyons… Non, non, malheureusement non. By Jove ! Comment allais-je oublier ? Cette poignée de main avec le grand manitou de la ligne claire*, un jour d’octobre dans cette bonne ville de Nérac perdue dans les brumes matinales du beau pays d’Albret. Une telle émotion !...
Je viens de me relire. Quel rebelle ! Quel sens de la formule ! On n’avait pas vu ça depuis le sergent Schultz au stalag 13. Sois rebelle et tais-toi, Moinet.
Et pourtant, oui, pourtant. Si tout ça m’avait permis de tomber - sérendipité du dépité - sur la plus belle citation anglaise du monde pour tout quinqua-maniaco-dépressif qui se respecte ? Pas celle d’Oscar Wilde (je sais pas qui c’est), lui qui résistait à tout sauf à la tentation,  mais celle de Neil Norman du NME (je sais qui c’est), qui a eu la chance de voir les deux qui suivent pour le prix d’un : "Contrairement à The Fall, qui m’ont donné envie de foutre un coup de pied à un chat, Joy Division m’ont convaincu que je pouvais cracher à la face de Dieu".
Voilà, je crois que je vais réécouter Fall heads roll et pour une fois regarder le nombre de "like" en bas à gauche pour compter ceux qui apprécient mon bon débarras. Mince, mon ordinateur est cassé… Mais non, c’est ma souris qu’est déglinguée !
- Patron ?
- Ne m’interromps pas pendant que je regarde "Questions pour un champion".
- Je suis un notable californien qui se transforme en justicier masqué pour secourir la veuve et l’orphelin.
Je suis ? Je suis ?
- Batman !
- Mais non enfin, Zorro ! Gotham city ne se trouve pas en Californie ! 6 points à 5. Monsieur Blain ?
- Je garde la main… Clic.
- Oui, Wally ?…
- Vous avez dû faire toutes les guerres pour être si fort aujourd’hui…
- Certes, mon fidèle catho, certes…
- On a sonné, patron.
- Qui m’importune à l’heure de l’apéritif ? Oddjob qui annule sa soirée trimestrielle ?
- Non, c’est encore Moinet, son chat et sa souris.
- Lâche les chiens !
      - Ahahahahahahah.      

 

Tout est bien qui finit bien. Star du premier article (http://fury.over-blog.com/article-14177152.html), la maman-robot a retrouvé son petit, 7 ans après. Sourire crispé et poussière d’origine à la clef. Une mère qui retrouve son fils,  n’est-ce pas là le principal ?

mercredi 2 décembre 2015

Bon tempo pour vos tympans - Décembre 2015



Contribution de Hong Kong Fou-Fou



Mise en garde : la sélection musicale que vous vous apprêtez à découvrir, l'oreille tendue et, j'espère, pas cassée, a été réalisée intégralement pendant la surveillance d'une séance de travaux pratiques d'optique géométrique à la fac. A défaut d'être consciencieux, j'ai essayé d'être respectueux à l'égard de mes étudiants : pour ne pas perturber leur travail, je me suis  abstenu de mettre le son sur mon ordinateur, j'ai juste regardé les vidéos. Bon, j'avoue aussi que j'appréhendais leurs éventuelles critiques de mes goûts musicaux. Le conflit des générations, ça s'appelle. Bref, ce mois-ci, ce qui m'a semblé bien, c'est :
John McGullagh and the Escorts : She's calling me
Ah ben c'est le cas, en plus. Une étudiante m'appelle pour que je lui explique les dérivées logarithmiques. Ne bougez pas, je reviens. Mais je vous laisse en de bonnes mains. Excellent petit groupe !
Fronteers : It's up to me now
Les virées entre copains, les blagues potaches, il n'y a que ça de vrai. Dommage pour eux, les jeunes que j'ai en face de moi ont d'abord leurs examens à passer. On se rattrapera en janvier.
Vangoffey : Trials of a modern man
L'ex-batteur de Supergrass a bien du mal à se faire respecter par les gamins. Pas comme moi avec mes diplômés du dernier rang. Y en n'a pas un qui moufte, ça travaille, ça s'applique, ça trace de jolis traits à la règle en tirant la langue. Bon, de temps en temps, un joyeux farceur s'amuse à viser la rétine d'un camarade avec un laser mais c'est sans malice. Blagues potaches, je vous ai dit.
The View : Under the rug
Un de mes groupes préférés du 21ème siècle, un extrait de leur très attendu nouvel album, après plusieurs années de silence : je vous avoue que ça m'arrange de ne pas écouter, j'ai trop peur d'être déçu. Vous me direz.
Et on finit par Raquel Welch, qui se déhanche sur Suzie Q. Pour être parfaitement franc avec vous, elle pourrait danser sur "La bonne du curé" ou "Carmina Burana", ça serait blanc bonnet (C, au moins) ou bonnet blanc (D, peut-être ?). Là c'est sûr, pas besoin de musique. J'en ai les lentilles de contact qui fondent. Mais ce n'est pas grave, je suis en TP d'optique, je vais me bricoler des lunettes de secours.



Contribution de Oddjob



Bernard Herrmann : Taxi Driver OST
Pour finir cette année, rien de mieux qu’un bon vieux standard de la musique de film. Du (très) grand Herrmann pour cette histoire d’un homme abandonné dans l’enfer de la Grosse Pomme et en quête du divin…
Billy Rider-Jones : Daniel
Pop mélancolique par un ancien de The Coral. C’est fragile et élégant tout à la fois. Bref, une bande son idéale pour affronter les premiers froids mais aussi (et surtout) les fiers à bras de tout poil…
Jeff Lynne’s Elo : Alone In The Universe
Le fantôme d’Electric Light Orchestra bouge encore… avec un Jeff Lynne désormais seul à la barre du navire sous influence de Roy Orbison et des Beatles.



Contribution de l'élève Moinet



Fin d’année, révision des classiques.
Edith Nylon : Avorton
Chanson nihiliste, très très nihiliste s’il en es, toute en energi non finte.
Les Olivensteins : Fier de ne rien faire
Chansson nihiliste (je sai pas ce que sa veu dire) sil en ai. Toute en émossion non simulé et en poési non emprinté. Sertifiée légende urbeine.
Starshooter : Get baque
Chansson toute en sueure non factisse, ni hiliste,  ni heu…(j’ai pas touvé, je voulai fère une blague)  et qui vous fait plus hésité entre I wanna hold your hand et I wanna be your dog. Gratificassion éternele !
Jean-François Coen : la tour de pise
Le geune Odjaube (ça, ça vous parle) toujour aussi romantic et pairtinant me soufle la bouche encore pleine : "Echappée belle de Modern Guy une chanson toute en demi-teinte et en demi-mesure. Un rébus parisien". Comme dabitud, rien a rajouté.
Marie et les garçons : attitudes
La pochette au polo. Céruléen. Chanson  intro /  refrain imparable : attitudes attitudes attitudes attitudes attitudes  attitudes attitudes attitudes attitudes attitudes attitudes attitudes attitudes. Toute en retenue non imposée. Un san faute cel la.
Les Civils : la crise économique
Une hallucination auditive m’a fait entendre pendant trente ans "je suis larbin d’hôtel" au lieu de  "je sirote un cocktail". Ou comment perdre au change. Nulle n’est parfaite, on ne devrait jamais vieillir.